Journal de bord d'un Directeur de la Photographie
Notes sur la lumière - pour le cinéma et les nouvelles images numériques.
26 janvier 2022
Le Making Of de Macbeth
19 janvier 2022
Macbeth inspire à Delbonnel un Noir et Blanc limpide, et prodigieusement beau
Tourné en couleurs sur Arri LF avec des Cooke S7 puis post-produit en Noir et Blanc, "La Tragédie de Macbeth" est LE film à voir en ce moment. Bruno Delbonnel AFC nous avait habitués à des films hauts en couleurs, comme Amélie Poulain ou le génial "The Ballad of Buster Scruggs".
Pour les non-anglophones je résume les points saillants ci-dessous, et je vous mets le lien vers les articles originaux à la fin de ce post.
© ICG Magazine |
- Joel Coen entend filmer ce Macbeth en studio comme un vrai film tout en flirtant avec une certaine théâtralité;
- Frappé par l'intensité du texte, Delbonnel opte pour le minimalisme: cadrages et lumières limpides, évoquant un Haiku. La meilleure façon selon lui de mettre le récit en valeur;
- Le Noir et Blanc s'impose dès lors, et qui plus est le format 1,37:1. Delbonnel explique que ce format presque carré permet de mieux isoler les visages;
- Principales références pour les images: certains films de David Lean, la photo de Greg Toland sur "Wuthering Heights". "Sunrise" de Murnau ou "Kwaidan" de Kobayashi. Mais surtout "La Passion de Jeanne d'Arc" de Dreyer.
- Le film est cependant tourné en couleurs pour offrir plus de souplesse à l'étalonnage;
A ce propos, le DIT Joshua Gollish et l'étalonneur Peter Doyle se sont référés aux films mentionnés ci-dessus pour créer un look sur mesure. En court-circuitant la LUT officielle et en travaillant dans un espace colorimétrique spécifique (Oklab, voir ci-dessous), ils ont pu offrir à Delbonnel d'une part une restitution plus subtile des valeurs de luminance, et d'autre part une palette de longueurs d'ondes qui englobait certains infrarouges et certains ultraviolets. Un procédé qui rappelle les photos de la fin du 19e siècle, où des plaques métalliques photosensibles reproduisaient certains UV et certains bleus plus intensément que d'autres couleurs.
- Delbonnel et le Production Designer Stefan Dechant forment un tandem extraordinaire.
Coïncidence? Une semaine avant d'être engagé sur le film, Dechant cherchait un projet dans la lignée du Dracula de Coppola. Bingo!
Galvanisés l'un par l'autre, ils vont jusqu'à peindre des ombres sur les murs, ou des cieux sur des toiles, comme au temps de l'expressionnisme. Une technique à laquelle Delbonnel avait déjà recouru pour le final de Buster Scruggs:
L'interview originale sur IndieWire.
ICG Magazine de janvier, lisible en ligne.
Un post détaillé en anglais sur le procédé photographique qui a influencé l'étalonnage de Macbeth.
Un article de fond en anglais sur l'espace colorimétrique Oklab, basé sur l'idée que la restitution de la seule luminance, lorsque l'on passe d'une image couleur à une image Noir & Blanc, n'est pas satisfaisante dans les espaces colorimétriques traditionnels:
"The Tragedy of Macbeth" est visible sur Apple TV+ (pendant les jours d'essai gratuits, je dis ça je dis rien...)
Le breakdown des VFX (effets spéciaux visuels). Attention spoilers:
_______
Orson Welles avait en son temps filmé un Macbeth, mais c'est son Othello (1951) qui reste, encore aujourd'hui, une référence absolue en chefoperie:
Hommage à Greg Toland, l'une des références image pour "The Tragedy of Macbeth".
26 novembre 2021
Intro à l'éclairage en 3D temps réel sur Unreal Engine 5 avec Lumen
03 avril 2021
High-end Low-Fi
30 mars 2021
Bientôt une série de vidéos gratuites sur la mise en lumière en 3D temps réel

Fabrice Bourrelly, formateur et spécialiste Unreal Engine, et moi nous passons d'innombrables heures à explorer le potentiel de l'éclairage en temps réel. C'est à mon sens un domaine où se joue une partie de l'avenir des chefs opérateurs.
22 janvier 2021
Cours lumière intensif: inscriptions ouvertes
20 novembre 2020
Christopher Doyle on Life, Beer and Messy Beds
I just witnessed the most friendly, chaotic, and inspiring conversation between DPs Christopher Doyle (HKSC) and Ed Lachman (ASC), live from their respective homes. This took place during the Camerimage online festival.
What's the Essence of Cinematography?
About wanting to become a cinematographer
Chris: "You have to actually, profoundly need to be this way. Once you have this need, each new day is a wonderful experience."You have to CARE.
And to trust what's THERE. Look at what's in front of you.
Chris: "If you can't see it, don't do it. But if it's there, if you have a way to look at the world that gives you pleasure, do it. By all means. Celebrate your ideas - and then take them a little bit further."
How to connect with a Director?
Ed Lachman: "Most directors don't know what we are doing!"Chris: "You can't talk it through. You have to show, and then they go Oooohh. That's the best moment."
Chris: "Show people what they expect to see, but in a way they don't imagine."
Teamwork
Chris: "Others do at least 70% of the work, and we do the rest. We are merely finessing: "yes - yes - no - no.""The team has to feel that you know what you're doing, that you're in charge. We have the responsibility to give these abstract ideas, a form."
What lenses did you use?
Chris: "I don't give a shit! Technical stuff is easy. What matters is working with people you love. On the last Gucci commercials we shot in Rome, I didn't risk catching the Covid-19 either for Gucci, or to shoot on the Alexa. The reason I took the risk is to shoot with a friend, who happens to be Gus Van Sant."Creative Directors on Commercials
Chris: "Useless people. All these fucking mood boards are a waste of time. I mean, I don't want to make "In the Mood for Love, Part 2".Early bird
Chris: "It's of utmost importance to be involved very early in the creative process, when you still can influence the creative stream. Even if you're not really paid to be there."Chris: "But then, in the first five days of a shooting, you know if it's going to work, with the give and take of energies, and then you can be bold."
Advice for young cinematographers, for whom making films is easier than when we shot on film negative
Ed and Chris: "You should know the difference between an image and a controlled image. You have to know color science and your camera, because you have to understand how to tweak around."The most important question you have to ask yourself is, "what will make this an image, a shot? What is it, for me?"
Chris: "What I despise most from students fresh out of film schools or professionals on commercials, is their determination to make a perfect image. NO. Life is far from perfect. Embrace imperfection! Leave the bed messy."
About imitating our Masters
Chris: "Citizen Kane is not N° 1 on the best films list because it's a copy. Don't copy. We shouldn't replicate. We have to feed on life, we have to live in order to become an artist. Why would you imitate? Be yourself. Engage directly with life."Ed: "Look around you, and then find what you feel close to. You may start as an imitator of your masters, but then you have to discover HOW they approached the image."
About framing and lighting
Ed: "You have to make people believe in your image. But we have to work for a specific frame. If you haven't seen how much or how little space we'll see, then you cannot light".Chris: "Yes: if we light the space first, the actors will go where their light is, and the story will follow."
Eloquence
Chris: "Eloquence is an essential word in cinematography. It has to be an engagement with space and time. It's really philosophical. You have to read, to live, to watch, to dance, to be here as a person - and then everything falls in place."Chris: "Vittorio (Storaro) is full of shit sometimes, but he cares. He's full of OUR shit."
The right attitude on the set
Ed and Chris: "Be prepared for the accident, the unexpected. It will put you on a plane we can call creativity.""Embrace also mistakes. Yours and others'. All these surprises, good or bad, will secretly suggest you to be even more creative."
"The mistakes are what makes the film."
About confinement and solitude
"It's really fruitful to be alone. Take the opportunity to go into yourself and find what's there. To reflect on what you really care about."How do you manage to stay creative during this period?
Chris: "Pornhub. (laughs) I mean, I'm in quarantine, real sex is unimaginable, but we still can watch. And isn't it what we really do, as cinematographers: watch?"___
Well, here it is:
Camerimage, Nov. 20, 2020
18 novembre 2020
Blood Rider - la lumière apprivoisée
Traduction du post en anglais publié ici.
Blood Rider, réalisé par Jon Kasbe et chefopé par David Bolen, a gagné la mention pour le meilleur court-métrage documentaire à Camerimage.
David et Jon sont tous deux Chefs Opérateurs, et leur tandem sur ce film est un exemple de ce qu'il est possible de réaliser, même en lumière naturelle et dans des situations chaotiques.
David a eu la gentillesse de répondre à mes questions.
Je vous recommande de lire ses réponses avant de voir le film, à la fin de ce post.
Si tu devais résumer l'aspect visuel de ce film, comment le décrirais-tu ?
D'une manière générale, notre objectif était de rendre ce film aussi intimiste et réaliste que possible. Nous avons principalement tourné avec un 35 mm (sur une Sony FS7), ce qui nous a obligés à rester proche de l'action plutôt que de recourir à des zooms.
Lorsque nous voulions un gros plan d'un personnage, nous devions nous approcher physiquement de lui, et je pense que le public peut ressentir cette intimité dans le style visuel.
Nous avons tout tourné à la main, et nous avons accepté le chaos et l'instabilité qui en découlaient.
Nous voulions que le public ressente la folie de ce que c'est que de conduire une moto à grande vitesse à travers Lagos.
Et pour concrétiser ces intentions artistiques, quelle a été votre stratégie pour contrôler vos images dans la vie chaotique de Lagos ?
Contrôler l'image représente toujours un vrai défi dans la réalisation de documentaires car on doit s'accommoder de la lumière disponible, dans la plupart des situations.
Nous voulions un look à la fois âpre et poétique tout au long du film, et nous avons généralement essayé d'éviter la lumière de face.
Mon approche était assez simple: chaque fois que cela était possible, nous avons tourné les plans extérieurs au crépuscule ou à l'aube.
Pour les intérieurs, j'ai toujours essayé d'éteindre toutes les lumières et d'utiliser la lumière naturelle des fenêtres. Cela crée des contrastes étonnants et nous donnait toujours une belle image.
Dans les situations où les fenêtres n'étaient pas une option, j'ai essayé d'éteindre les lumières au premier plan pour aider à créer des zones de lumière autour de nos personnages. Il s'agissait toujours de créer des zones contrastées d'obscurité et de lumière au sein d'une même image.
La palette de couleurs est inhabituelle et met des "rouges sang" au premier plan, mais de manière très subtile. Le rouge est normalement une couleur agressive, et le simple fait de la désaturer lui donne normalement un aspect marron. Il n'en est rien dans Blood Rider. Comment avez-vous contrôlé cela ?
La couleur rouge joue évidemment un rôle prépondérant dans ce film car c'est un symbole de la vie.
A un niveau plus simpliste, c'est aussi la couleur du sang. Nous avons eu la chance que les motards aient un uniforme rouge, et nous avons essayé de les garder dans cette tenue autant que possible. Cela a créé un contraste de couleur qui les a séparés des arrière-plans chaotiques de Lagos.
Pour aller avec notre look granuleux, nous avons légèrement désaturé le rouge en post, afin qu'il ne soit pas trop vibrant ou distrayant. Pour répondre honnêtement à la question, nous avons eu beaucoup de chance.
L'atmosphère granuleuse de la "partie Joseph" du film semble provenir de votre utilisation de la lumière disponible. Avez-vous ajouté des sources artificielles ou des lumières de jeu ?
Dans la plupart des cas, j'essaie d'utiliser les lumières artificielles disponibles. Ma méthode est simple : éteindre toutes les lumières derrière la caméra et allumer toutes les lumières derrière les sujets. Cela permet de créer une lumière qui modèle bien les personnages.
Dans ce lieu particulier, il n'y avait la plupart du temps que des plafonniers, ce qui n'était pas très joli. Comme simple kit d'éclairage, j'ai amené quelques LEDs Quasar, sur batteries, dans la plupart des endroits. Pour le plan ci-dessous, j'ai éteint toutes les lumières zénithales et j'ai placé un Quasar 60 cm dans le fond. Tu peux voir l'effet sur le visage de Joseph.
Vous avez surpris Joseph dans des endroits inhabituels pour son interview, allongé sur son lit par exemple. Dans un autre cas, deux personnes qui parlaient semblent avoir été placées très loin l'un de l'autre et à 90 % afin de créer des silhouettes et des flous, indépendamment de la cohérence spatiale. Cela semble très irréaliste et pourtant totalement convaincant.
Bien entendu, cela reflète les choix du réalisateur, mais comment avez-vous collaboré pour paraître aussi symbiotiques ? (Jon Kasbe, le réalisateur, semble également avoir un œil très sûr!)
Jon est un Réalisateur incroyable, et un Chef Opérateur vraiment fantastique aussi. Nous tournions avec deux caméras, chacun la sienne. À ce stade de notre collaboration, nous avons tourné des milliers d'heures ensemble, et nous pouvons communiquer avec de simples regards.
Nous comprenons les mouvements de l'autre et pouvons généralement rester hors du champ de l'autre, tout en obtenant des images très intimistes. C'est une sensation incroyable quand j'ai l'idée de changer d'angle et que je réalise que Jon a déjà trouvé la position que je m'apprêtais à occuper!
Nous sommes très synchrones sur le plan visuel. Cette scène était simple d'une certaine manière - nous avons éteint toutes les lumières, et utilisé les fenêtres derrière les personnages comme source principale - les profils étaient silhouettés, et les faces, soit dans la pénombre soit en latérales.
C'est une scène dramatique, car les personnages discutent des enjeux du travail et des vies qui sont entre leurs mains. Il a semblé approprié de les laisser dans la pénombre alors qu'ils abordaient ces questions.
Une double question : dans quelle mesure connais-tu ce qu'il est possible de réaliser en matière d'étalonnage (recadrage compris), et de quelle manière cette compétence affecte-t-elle tes habitudes de tournage ?
L'étalonnage est toujours très important pour moi en tant que Directeur de la Photographie, et j'expose généralement les images pour nous donner le plus de marge possible à l'étalonnage.
Pour ce projet en particulier, nous avons tourné sur la Sony FS7 - c'est une petite caméra idéale pour un documentaire, puisqu'elle permet d'obtenir des images cinématographiques avec un corps léger et peu encombrant.
Le seul problème, c'est qu'elle devient très bruyante quand on sous-expose, ou même quand on expose normalement. C'est pour cette raison que nous avons tout filmé en surexposant le plus possible, juste avant de clipper les hautes lumières. Cela nous a donné une image beaucoup plus nette, et davantage de latitude en colorimétrie. En post-production, nous avons tout assombri de manière significative, et désaturé les couleurs pour aboutir aux tonalités que vous voyez dans le film final.
Quel est ton plan préféré et pourquoi ?
C'est celui-ci :
Pour moi, c'était un moment magique. On voit le bébé clairement pour la toute première fois, et on ne sait pas s'il respire ou non. Puis, finalement, il commence à pleurer. C'est un profond soulagement car nous savons enfin que le bébé va bien, et que le travail du Blood Rider est terminé.
Capturer des moments comme ceux-ci me donne l'impression d'avoir beaucoup de chance d'être cinéaste.
Quel matériel caméra / objectifs et éclairage as-tu utilisé ?
Caméra : Sony FS7 avec objectifs Canon série L (35mm, 50mm, 24-105mm)
L'éclairage : Kit Quasar sur batteries (2ft, 1ft, 6inch)
Une question plus générale : pourrais-tu nous montrer une photo que tu as affichée bien en évidence chez toi, qui t'inspire et te touche particulièrement, même de façon mystérieuse ?
Et commente-la, si tu en as envie.
Je suis un grand fan de Todd Hido, en particulier de sa série "House Hunting". Je garde tous ses livres sur ma table basse, et ils me servent constamment d'inspiration et de référence.
Cette image en particulier m'a toujours parlé. La pénombre, le brouillard et la lumière rougeoyante de l'intérieur me parlent beaucoup.
Il y a tellement de mystère dans cette image que je me demande souvent ce qui se passe dans la maison. Certains jours, j'ai l'impression que c'est quelque chose de joyeux, tandis que d'autres jours, je sens quelque chose de tragique.
Pour moi, une bonne image peut signifier beaucoup de choses différentes, selon le jour où tu la regardes.
"Blood Rider" - Natural Light at its Best
"Blood Rider" is a short documentary directed by Jon Kasbe and DP'd by David Bolen. Their film won the mention at Camerimage as the best photographed short doc of the year.
David and Jon are both Cinematographers, and their tandem on this film is an example of what's possible to achieve, even in natural light and chaotic situations. David was kind enough to answer my questions.
I recommend that you read his answers before playing the movie, at the end of this post.
If you had to summarize the look of this film, how would you describe it?
And in order to achieve this “mood board”, what was your strategy to control your pictures in the chaotic life of Lagos?
On a more simplistic level, it’s also the color of blood. We were lucky that the riders had red uniforms, and we tried to keep them in that outfit as much as possible. It created a great pop of color that separated them from the chaotic backgrounds of Lagos.
To go with our gritty look, we desaturated the red slightly in post, so that it didn’t feel too vibrant or distracting. To answer the question honestly, we got very lucky.
Of course, it reflects the Director’s choices, but how did you collaborate to seem so symbiotic? (Jon Kasbe the Director seems to also have a very strong eye)
Jon is an incredible director, and a really fantastic cinematographer as well. We shoot two cameras, he operates one and I operate one. At this point, we’ve shot thousands of hours together, and can communicate with simple eye gestures.
We understand each other's movements, and typically can stay out of each other’s shots while still getting very intimate images. It’s an amazing feeling when I have an idea to shift angles, and realize that Jon has already found the shot I was about to take.
We are very in sync on a visual level. This scene was simple in a way - we turned off all the lights, and used the windows behind them as a key light - when shooting profiles, this put them in silhouette, and when shooting frontals, this gave them fantastic half-light.
This is a dramatic scene, as the characters discuss the stakes of the job, and the lives that are at risk. It seemed suitable to play them in darkness as they reflect on this idea.
A double question: how far are you aware of what's possible in color grading (reframing included), and in what way does this knowledge affect your shooting habits?
Color grading is always very important to me as a cinematographer, and I typically expose images to give us the most room to play around once we get into the grade.
For this project specifically, we shot on the Sony FS7 - it’s a great little camera for a documentary, and allows you to get cinematic images with a small/lightweight body.
The only issue is that it gets very noisy when you underexpose, or even normally expose. For this reason, we shot everything highly overexposed to where we were just under the point of clipping the highlights. This gave us a much cleaner image, and more latitude in the color grade. In post, we darkened everything significantly, and desaturated the colors to give it the atmospheric tones that you see in the final film.
What is your favorite shot and why?
Here’s my favorite shot:
To me, this was a magical moment. The baby is seen clearly for the very first time, and it’s unclear whether he’s breathing or not. Then, finally, he begins crying and there is a deep relief as we finally know the baby is okay, and the rider’s job is done.
What Camera / Lenses & Lighting package did you use?
Camera: Sony FS7 w/ Canon L-Series Lenses (35mm, 50mm, 24-105mm)
Lighting: Battery-Powered Quasar Kit (2ft, 1ft, 6inch)
A more general question: could you show us a picture that you’ve displayed prominently in your home, that resonates a lot with you, even in mysterious ways? And comment on it, if you feel inclined to.
I’m a huge fan of Todd Hido, especially his House Hunting photo series. I keep all his books on my coffee table, and they constantly serve as a point of inspiration and reference.
Thanks for your time!
15 octobre 2020
Trip technique: la calibration des sources LED en fonction des caméras
Dans les domaines qui nous intéressent, deux tendances lourdes se dégagent depuis quelques mois:
- l'arrivée massive d'objectifs adaptés aux grands capteurs,
- et une certaine standardisation de la restitution des "vraies" couleurs par toute la chaîne des outils techniques y compris, et c'est tout nouveau, sur les sources elles-mêmes.
Je tente ici de faire un petit point d'étape sur cette deuxième tendance.
Alors que les arts graphiques avaient conçu voici des décennies diverses façons de contrôler le suivi des couleurs depuis l'écran d'ordinateur jusqu'à l'impression (CIELAB et autres standards), le cinéma numérique accuse encore un retard un peu honteux.
En effet, les couleurs perçues sur un plateau ne sont toujours pas, à l'heure actuelle, fidèlement restituables tout au long de la chaîne tournage > post-prod > display. La faute en incombe à un manque de coordination technique entre les fabricants:
- de sources de lumière
- de capteurs
- de moniteurs/TV
- et des logiciels qui font dialoguer ces bestioles.
Diverses unités de mesures existent depuis un certain temps déjà, mais les possibilités de corriger les aberrations restaient rares.
Les mesures
![]() |
Ces irrégularités ne peuvent pas se corriger avec des gélatines. Lorsqu'une couleur n'existe pas, elle ne peut être compensée. |
Les premières tentatives
Nicolas Goerg de Rosco DMG Lumière aborde cet aspect avec humilité dans cette toute récente interview confinée avec James Mathers - Digital Cinema Society (en anglais):
Ce qui va changer
Dans les grandes lignes, la vidéo qui suit résume bien ce qui est en jeu, c'est-à-dire non plus seulement mesurer, mais donner aux fabricants de sources d'éclairage les informations quant à ce que chacun des capteurs de différentes caméras perçoit du spectre lumineux de leurs éclairages. Construire un pont à double sens entre les caméras et les lumières. Corriger le flux lumineux des projecteurs pour qu'ils restituent fidèlement toutes les couleurs que le capteur est en mesure d'enregistrer.
Brad Dickson a mis au point ce qu'il appelle les "empreintes digitales" des sources lumineuses, en mettant en avant les différences de rendu des couleurs par rapport à une source tungstène de référence. Voici par exemple le rendu chromatique, sur un capteur d'ALEXA, d'un MIX (à droite) par rapport à une source tungstène de référence (à gauche). On constate - ce qui n'est de loin pas toujours le cas - une grande ressemblance entre les deux graphs.
Les fabricants de projos sont friands de ce genre d'informations, parce qu'ils peuvent ensuite ajuster leurs sources pour faire correspondre au mieux les gammes chromatiques (source et capteur).
PDF du communiqué de presse de KinoFlo sur les LUTs qui s'adaptent aux caméras utilisées, "True Match".
21 juin 2020
"Le Passant", mon coup de coeur du Festival d'Annecy
J'ai donc posé quelques questions à Pieter Coudizer, le réalisateur/animateur qui s'est également révélé être un cinéphile enragé. Son utilisation de la lumière, des objectifs et des mouvements de caméra est tout simplement hypnotisante.
The english version of this interview is here.

Votre film semble être un exemple parfait pour illustrer le travelling latéral.
Qu'est-ce qui vous est venu à l'esprit en premier ? L'idée de faire un film "uniquement" avec des déplacements latéraux, ou l'histoire, qui se passe dans la même rue ?
Je pense que l'histoire et l'idée de le faire en utilisant un travelling latéral m'est venue en même temps. Tout d'abord, l'histoire est basée sur quelque chose que j'ai vu quand j'étais très jeune et qui n'a jamais quitté mon esprit. J'ai assisté à l'événement réel avec un "vrai" déplacement latéral, non pas à vélo, mais à pied. Dans ma tête, l'histoire ne pouvait donc être racontée que de cette manière.
Le contexte, d'une certaine façon, est l'aspect le plus tragique de toute l'histoire : quoi qu'il arrive, la vie continue. Avec les voyages incessants et non montés, je voulais mettre ce point en évidence.

En plus de rouler dans la rue, avec du feuillage entre vos personnages et votre caméra pour créer de la profondeur, votre caméra semble être tenue à la main ET zoome en avant et en arrière. Avez-vous étudié les vidéos en live ? Comment avez-vous procédé pour obtenir cette incroyable fluidité ? Je veux dire, à part le flou de mouvement ;-)
En fait, avec une caméra à main, j'ai filmé une marque que j'ai dessinée sur un mur, puis j'ai mappé ce mouvement réel de la caméra à main sur l'image animée. Les zooms ont été créés séparément en plus de ce mouvement. C'était un processus très difficile pour que tout soit bien synchronisé, surtout parce que les temps de rendu étaient très longs. Les images étaient si lourdes que je ne pouvais rien vérifier en temps réel. Je rendais pendant 7 heures, puis je vérifiais, je remarquais une erreur ou un mauvais timing, je faisais les modifications et je les rendais à nouveau, jusqu'à ce que je sois satisfait.
Mais pour répondre à votre question de manière plus succincte : tous les différents types de mouvements de caméra dans le film étaient filmés ou animés séparément, puis ajoutés les uns aux autres. Je réalisais le rendu d'un mouvement latéral précis, puis j'ajoutais le mouvement de la main, puis je faisais un zoom avant et arrière sur cette image.
En ce qui concerne les flous, certaines parties des images présentent des aberrations chromatiques et/ou sont légèrement floues. Cela ajoute des qualités cinématographiques pures tout en établissant une sorte d'aspect low-fi. Souhaitez-vous "détruire" l'aspect et la sensation de pureté de la 3D ? Ou était-ce pour une autre raison ?
La plupart des films d'animation numérique modernes ont un aspect très épuré. Je voulais quelque chose de plus texturé, peut-être même d'imparfait. Pour moi, cela crée un sentiment qui est légèrement plus proche de la réalité. Mais c'est aussi une façon de rendre l'image plus vivante. En fait, il y a une réelle inspiration pour cette façon de traiter l'image : Le film "Faust" d'Alexander Sokurov, qui a remporté le Lion d'or à la Mostra de Venise en 2011. Ce film est tourné en numérique, puis fortement coloré et manipulé en post-production.
Sokurov n'utilise pas seulement de lourds filtres de diffusion, mais à certains moments du film, il distord l’image. J'ai trouvé que c'était fantastique, presque pictural, et j'ai donc essayé des choses similaires sur mes propres images.

Les lumières suivent et soulignent l'arc dramatique de votre histoire, qui commence dans un après-midi d'été vibrant et se termine sous un orage intense. Comment avez-vous calibré ces effets pendant l'animation ?
J'ai simplement utilisé beaucoup de couches de couleur - probablement plus de cinquante - que j'ai placées sur l'animation et dont j'ai modifié l'opacité du début à la fin. Des couleurs bleues pour les séquences de pluie, et jaune/orange pour les moments ensoleillés. J'ai également appliqué un effet de diffusion pour faire disparaître une partie de la lumière du soleil.
L'eau pendant l'orage est rendue avec un soin exceptionnel car elle est à la fois dense et très détaillée, surtout à l'arrêt de bus. Comment êtes-vous parvenu à un tel résultat ? Je sais que c'est un détail, mais il est révélateur du reste de la direction artistique très inspirée du film.
Pour une raison étrange, j'aime vraiment la pluie, au cinéma comme dans la vie réelle, donc il était très important pour moi de créer une bonne atmosphère. Il y a quelques années, j'ai acheté une caméra Blackmagic Pocket Cinema d'occasion. Je l'ai utilisée pour filmer de la vraie pluie devant un ciel sombre et je l'ai mise dans le film, en même temps qu'une pluie animée. Le fait de mélanger des éléments animés et de les rehausser avec de subtiles séquences en direct est une autre façon de rendre le tout plus réaliste. L'eau dans la rue et sur le toit de l'arrêt de bus est entièrement animée.
Quelques réponses courtes :
Logiciels utilisés :
Une combinaison de Fusion et After effects pour le compositing et Toonboom pour la plupart de l'animation.Durée de la production :
Avant la production, nous visions 6 mois. Mais quand nous avons commencé, il est vite apparu que le film était très ambitieux sur le plan technique. Finalement, nous avons terminé le film en 15 mois.Qui sont vos maîtres en cinéma d'action et en animation ?
Je suis un cinéphile. Je regarde presque un film par jour. Il y a donc beaucoup de cinéastes que j'admire. Je préfère ceux qui ont un style très particulier. Les premiers auxquels je pense : Tarkovsky, Ozu, Fellini, Mizoguchi, Robert Bresson, Bela Tarr, Akira Kurosawa, Dreyer, Michael Haneke, Sergio Leone, Bruno Dumont, Dario Argento, Stanley Kubrick, Steven Spielberg, Lars Von trier, Martin Scorsese, David Fincher, David Lynch, etc. Oui, c'est une liste de noms très "cinéphile".En animation, j'aime beaucoup les films des frères Quay et de Yuri Norstein. La texture de leurs œuvres m'inspire vraiment. Et j'apprécie presque tout ce qui sort du Studio Ghibli, de Miyazaki à Isao Takahata. Ma liste de films d'animation est plus courte que celle des films d'action, mais je pense que c'est parce qu'il y a moins de longs métrages d'animation avec un style particulier.
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Le Festival d'Annecy en ligne propose un contenu impressionnant pour seulement 15€.
18 juin 2020
"Le Passant", my big Annecy Film Festival Crush
Cet interview s'est déroulée en anglais, la Version Française se trouve ici.
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This year, the Annecy Film Festival is taking place online. It gives you the unique opportunity to discover the very best of international animation films. In the Short Films competition, "De Passant" struck me for its powerful storytelling, and also for its cinematic qualities. I wanted to share my discovery of this gem with you, even if you cannot view the film right now. And to be clear, the teaser is not representative of the film, because it tries hard not to spoil anything and thus, shows almost nothing.
So I asked a few questions to Pieter Coudizer, a director/animator who also turned out to be a rabid moviegoer. His use of light, lenses and camera movements are simply mesmerizing.
Your film seems a perfect example to illustrate the lateral traveling camera.
What came first in your head? The concept to do a film "only" with lateral travelings, or the story, happening along the same street?
I think the story and the idea to do it using a lateral traveling actually came in my head at the same time. First of all: the story is based on something I saw when I was very young and that has never left my mind. I witnessed the real event with a 'real' lateral traveling, not on a bike, but walking past it. So in my head the story could only be told in this way.

Aside from rolling along the street, with foliage between your characters and your camera to create depth, your camera seems handheld AND zooms in & out. Did you study live footage? How did you proceed to get this incredible fluidity? I mean, apart from motion blur ;-)
Actually, with a handheld camera I filmed a mark I drew on a wall, and then mapped that real handheld-movement to the animated image. The zooms where animated separately on top of that movement. It was a very difficult process to get everything timed just right, especially because the render times where very long. The images where so heavy that I could not check anything in real-time. I would render for 7 hours, then check it, notice a mistake or a timing that wasn't perfect, make the changes and render it out again, until I was satisfied.
Regarding blurs, some parts of the pictures have chromatic aberrations and/or are slightly out of focus. It adds pure cinematic qualities while establishing a sort of a low-fi aspect. Did you want to "destroy" the pristine 3D look & feel? Or was it for another reason?
Most modern, digitally animated films have a very clean look. I wanted something more textured, maybe even imperfect. To me it creates a feeling that is slightly closer to reality. But it is also a way to make the image feel more lively. Actually, there is a real inspiration for this way of treating the image: Alexander Sokurov's film "Faust" which won the Golden Lion at the 2011 Venice Film Festival. That film is shot digitally and then heavily color graded and manipulated in post-production.

The lighting follows and underscores the dramatic arc of your story, beginning in a vibrant summer afternoon and ending under a massive storm. How did you grade these effects during the animation?
I simply used a lot of layers of color – probably more than fifty – I placed on top of the animation and changed the opacity from beginning to end. Blue colors for the rain sequences, and yellow/orange for the sunny moments. I also aplied a diffusion effect to bloom out some of the sunlight.

The water during the storm is rendered with exceptional care as both dense and very detailed, especially on the bus stop. How did you arrive at such a result? I know it's a detail, but it speaks for the rest of the movie's clever and inspired Artistic Direction.
For some strange reason, I really love rain, both in movies and in real life, so it was very important for me to get that atmosphere right. A couple of years ago I bought a secondhand Blackmagic Pocket Cinema Camera. I used it to film real rain in front of a dark sky and I put it in the film, together with animated rain. Mixing elements that are animated and heightening them with subtle live-action footage is another way to make it feel more realistic. The water on the street and on top of the bus stop is fully animated.
Some short answers:
Software used:
A combination of Fusion and After effects for the compositing and Toonboom for most of the animation.Length of production:
Before the production we aimed at 6 months. But when we started it became quickly apparent that the film was very ambitious on a technical level. Finally, we finished the film in 15 months.Who are your Masters in live-action movies and in animation?
In animation I really love the films of The Quay brothers and Yuri Norstein. The texture of their works really inspires me. And I enjoy almost everything that comes out of Studio Ghibli, from Miyazaki to Isao Takahata. My list of animation is shorter than live-action, but I feel that's because there are less animated feature films with a distinctive style.