L'un des aspects les plus attachants de ce film ce sont ses images, signées Danny Cohen. Ce chef op anglais - que j'avais découvert sur quelques épisodes de la minisérie "John Adams" - fait beaucoup parler de lui depuis qu'il est nommé pour l'Oscar de la meilleure photo pour "Le discours d'un roi". Un outsider beaucoup plus intéressant qu'il n'y paraît à première vue. En tout cas un vrai artisan.
A première vue en effet, si quelque chose saute aux yeux dans ce film, ce sont ses cadrages audacieux (ultra grands angles et décentrements "autistes") plutôt que sa lumière. Danny avait déjà recouru aux très courtes focales dans John Adams, et c'était parfaitement réussi. Pas évident de placer un acteur à 30 ou 60 centimètres d'un très grand angle.
"What's great about Master Primes is they have an insane range of lenses, from 10, 14, 16, 18, 21, 25, 27, 33—a huge spread, which gives you a good choice. What's peculiar is that even though the jump in the lens size is 3 millimeters, just by having that degree of choice, it can change the complete angle of view and how the face films."
Ces courtes focales ont également servi dans les plans généraux d'extérieurs:
Mais une vision plus attentive du film permet de détecter des finesses d'éclairage qui donnent une vraie personnalité aux images.
Cet antichambre obscur donne la gamme chromatique du décor complet: jaune pâle et vert. Notez que ni le visage ni le sol ne semblent fortement affectés par les vitres vertes. Cette touche verte - il fallait oser - empêche ces images de sombrer dans la banalité, ou le réalisme stérile.
Lorsque la porte s'ouvre, les raccords chromatiques sont déjà en place: verrière verte et luminaires jaune pâle. Les grands angles en mouvement ajoutent une certaine étrangeté aux images. On pense parfois à du Welles ("Le Procès").
Traitement de faveur pour le personnage féminin: même décor, mais la caméra passe en focale moyenne.
Ces verrières vertes sont décidément étranges, et révèlent que le maître des lieux est sans doute un original. Ce qui se vérifie rapidement. Une couleur qu'on retrouvera plus tard dans le film, lors de la longue séquence dans l'abbaye de Westminster.
Ce cadrage très frontal peut faire penser à du théâtre filmé. Mais les séquences qui se passent dans ce décor sont tellement bien découpées qu'on en oublie cet aspect.Ces plans généraux qui respirent révèlent un système d'éclairage inhabituel.
Contrairement à ses dires, sur les gros plans féminins, Danny a visiblement ajouté des lumières autour de la caméra. Le key light haut placé ne peut pas provenir de la fenêtre. De plus il est diffusé, et adouci par un fill qui ajoute une petite touche de vie dans les yeux.
Mais ce qu'on retiendra surtout du film, ce sont les décadrages, qui laissent des vides étranges autour des personnages, et contribuent à entretenir cette atmosphère décalée.
L'équipe image au grand complet. Bonne chance à eux pour les Oscars!
Interview tirée de Studio Daily online.
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RépondreSupprimerOui, simple et beau. Tu as raison, on sent une vraie culture visuelle derrière tout ça.
RépondreSupprimerJ'adore ce genre d'article. Tout simplement parfait, un bonheur ! Merci.
RépondreSupprimerPar contre comment se fait-il que les "vitres vertes" je les voient bleues ?
Tu as raison ça dépend des écrans. Disons bleu turquoise alors. L'essentiel étant qu'on s'éloigne du réalisme naturaliste.
RépondreSupprimerMerci pour ton feedback!
je n'ai pas vu le film,mais en regardant les images avec ces fenêtres turquoises et surtout le plan général avec cette verrière qui les surplombe, j'ai le sentiment de personnages dans un aquarium. Je ne sais pas si c'est pertinent par rapport à la mise en scène et à l'histoire, mais c'est mon feeling.
RépondreSupprimerjef
Oui Jef, pourquoi pas? J'ai vu le film dans 3 projections différentes, et j'ai constaté que le look des fenêtres est assez différent d'une copie à l'autre. Sur une des copies, les fenêtres ressortent plus claires, et plus bleues. Mais ce décor a une vraie personnalité.
RépondreSupprimer5D ou pas alors ?
RépondreSupprimer@Anonyme: pourquoi cette question 5D à la suite de ce post?
RépondreSupprimerBonsoir,
RépondreSupprimertrès sympa cet article... une petite question...
En imaginant que je dois reproduire cet effet de lampe "bleu froid" "bleu vert" avec juste un set de néons (type classique T8)... je dois aller vers quel type de néon niveau degré de couleur?? avec un IRC spécifique?? j'imagine aussi en rapport avec un réglage de la WB de la caméra... merci d'avance pour votre aide... si ma question est compréhensible...
Laurent.
Merci Anonyme. Le moyen le + simple serait de "geller" les fenêtres (=de disposer des gélatines sur les fenêtres), et d'éclairer normalement tes intérieurs. L'IRC ne te donne pas une indication de température de couleur, seulement du pourcentage de couleurs correctement restituées. En général 80% avec les fluos du commerce. Je ne comprends pas trop ta question pour ce qui est de l'utilisation de fluos, puisque dans les exemples que je montre dans le post les parties "froides" sont les ouvertures vers l'extérieur.
RépondreSupprimerMerci pour ta réponse montjo...
RépondreSupprimerEn fait, pour être plus précis, j'essaye de trouver un type de néon qui restitue mal les couleurs, pour avoir ce côté un peu bleu vert... c'est pour ça que je posais la question... style un peu néon de parking... ce vert-bleu assez froid... aurais-tu une idée sur ce que je pourrais utiliser comme type de néon pour arriver à cet effet, et si tu as une référence en tête? ce serait super... comme ça je serais ce que je peux utiliser...
encore merci d'avance à toi,
Laurent.
Un néon restitue mal les couleurs, il ne donne pas une dominante. Le mieux dans ce cas est de le colorer en lui enfilant un manchon (une gélatine roulée en cylindre) de la couleur que tu veux. La gélatine Fluorescent Green devrait te plaire.
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