Alors que bon nombre de chefs op affirment adapter leur esthétique en fonction de critères extérieurs (scénario, références données par le réalisateur, univers créé par la déco, ...) les choix esthétiques de Janusz Kaminski, tout comme ceux de Robert Richardson d'ailleurs, reposent avant tout sur leur goûts personnels.
Kaminski s'en explique dans un exercice intéressant proposé par le magazine Vulture: commenter ses 10 plans préférés.
Comme il le résume lui-même:
"It's a big palette, the movie screen. I dare to compare myself to painters, but I just have a bigger canvas to adapt to. If you don't like my painting, don't see the movie, you know?"
Ce lien vous mène sur Vulture: http://goo.gl/Af8Uf
D'après la bande-annonce de Lincoln, il recourt à de nombreux contre-jours, dont certains particulièrement risqués: la fumée omniprésente révèle parfois des sources placées au sol, ce qui est incongru pour un film d'époque.
Ma question: pourquoi n'osons-nous pas prendre ce genre de libertés?
J'ai 2-3 idées:
1) la peur du regard des confrères: "on sent tes sources", "c'est pas professionnel";
2) les moniteurs sur le plateau, qui permettent à chaque membre de l'équipe de donner son avis (il se trouve toujours quelqu'un pour signaler au réalisateur qu'on devine une source ou que les couleurs sont "bizarres");
3) le respect des conventions.
Sur votre prochain film: lâchez-vous. Tentez une manoeuvre inusitée. Un dérapage contrôlé. Et assumez sereinement le résultat.
Ce lien vous mène sur Vulture: http://goo.gl/Af8Uf
D'après la bande-annonce de Lincoln, il recourt à de nombreux contre-jours, dont certains particulièrement risqués: la fumée omniprésente révèle parfois des sources placées au sol, ce qui est incongru pour un film d'époque.
Ma question: pourquoi n'osons-nous pas prendre ce genre de libertés?
J'ai 2-3 idées:
1) la peur du regard des confrères: "on sent tes sources", "c'est pas professionnel";
2) les moniteurs sur le plateau, qui permettent à chaque membre de l'équipe de donner son avis (il se trouve toujours quelqu'un pour signaler au réalisateur qu'on devine une source ou que les couleurs sont "bizarres");
3) le respect des conventions.
Sur votre prochain film: lâchez-vous. Tentez une manoeuvre inusitée. Un dérapage contrôlé. Et assumez sereinement le résultat.
Excellent ! Effectivement, ce respect des conventions on vous l'apprend dès le moment ou vous tentez de vous former dans l'audiovisuel. On ne vous apprend pas seulement à utiliser du matériel mais on vous forme à une certaine esthétique, on vous donne du prémâché (qui d'ailleurs n'est pas forcément jolie, juste conventionnel) à vous ensuite de savoir le réutiliser. Pour bâtir sa propre esthétique, rien de mieux que de se former sur des projets personnels ou amateurs ou personne ne vous donnera d'ordre sur votre lumière et ou vous pourrez faire ce que vous avez envie sans avoir à vous plier aux règles établies dans "La lumière pour les nuls".
RépondreSupprimerQuestion: il parle de "Silhouette filters", qu'est ce que c'est ??
Bravo et merci!
RépondreSupprimerJe parlerais aussi de la frilosité des réa, bon, à ma petite échelle de courts.
RépondreSupprimermerci Pascal pour ce très bon post qui ouvre à plein de questions! j'en pose une supplémentaire: en faisant abstraction du fait que ce soit l'immense kaminski qui ait éclairé ces plans, trouvez-vous celà réussi?
RépondreSupprimeralors oui moi aussi je suis un grand fan des contre-jours, et quand on créé des atmosphères embrumés c'est la meilleur façon de les exploiter. Je ne suis pas du tout pour le réalisme coute que coute quitte à faire du moche, à ce moment là on éclaire tout comme les films de Rohmer.
la ou Kaminski a raison c'est dans son analogie à la peinture. On pourrait alors dire à quoi bon faire une école d'art, au diable toutes les règles d’esthétiques et de compositions...
je crois que pour être transgressées, les règles doivent être bien connues et maitrisées. C'est là qu'intervient la notion très subjective de talent, comme en peinture. Alors ok, on sent la source au sol ds le dernier plan, mais elle permet de bien détacher le personnage du fond, et l'ambiance lourde et studieuse est tout à fait réussie.
le principe d'un parti prix, c'est qu'il ne fait souvent pas l'unanimité mais qu'il permet de créer, alors à vos pinceaux euh, projos!
Sam, merci pour pour ton feedback. Tu as raison avant de transgresser il faut connaître et appliquer les règles qui ont fonctionné jusque-là, ne serait-ce que parce qu'elles ont fait leurs preuves, et que le public y est, consciemment ou non, habitué.
RépondreSupprimerQuant à ta question sur Lincoln, à savoir si je trouve ça réussi, on tombe dans la subjectivité de goûts et des couleurs. Personnellement je trouve un poil excessif le contre-jour puissant dirigé sur un personnage aux cheveux gris (1ère capture d'écran). Tout comme je trouvais assez peu judicieux le recours aux contre-jours HMI dans les extérieurs jours de WAR HORSE. Dans ce dernier film, mis à part la dernière séquence sublime dans un coucher de soleil glorieux, j'avais trouvé que Kaminski s'était carrément fourvoyé. Comme quoi ça arrive aux meilleurs, et ça n'enlève rien à son impressionnant talent. C'est quand même l'un des DP qui a créé le plus d'images iconiques ces deux dernières décennies.
Edouard: les "silhouette filters" n'existent pas en tant que tels. Janusz s'est un peu emballé sur ce point ;-)
RépondreSupprimerPerso, j'aimais pas Kamisky, mais je commence a apprécier de plus en plus son travail en fait.
RépondreSupprimerEt j'avais trouvé Warhorse, justement, mieux que d'habitude.
Mais j'ai toujours regretté que Speilberg ait décidé de lui confier toute sa lumière a jamais.
On est loin de Slocombe et le dernier indy nous l'a violemment rappelé.
Quand a Lincoln, il fait juste carrément la lumière qui lui fait envie, mais c'est plutôt joli.
En fait :soit on met des bougies et on éclaire pour reconstituer leur lumières dans le décor (de manière signifiante s'entend), soit on fait juste la lumière qu'on veut en laissant les bougies comme simple élément de déco.
C'est ce qui semble être le cas ici, les éclairages sont presque blancs alors que les pièces sont décorées d'ampoules très chaude.
Mais bon, quand on voit ce qui se fait chez nous, on peu difficilement avoir l'impudence de critiquer ce genre de travail. :)
Sans parler de l'étalonnage.
J'ai l'impression qu'en France ils ne connaissent pas l'étalo, étape pourtant encore plus importante (et facile) avec le numérique, mais bon...
Merci Thierry. Kaminski avait toute une palette de nuances entre le "tout bougie" et le "je fais ce que je veux". Ses contre-jours auraient par exemple pu être plus chauds ET provenir du sol ou du plafond.
RépondreSupprimerJe suis personnellement très partisan des partis-pris assumés, tant qu'ils ne sortent pas le spectateur du récit.
Lorsque tu mentionnes ce qu'on fait chez nous, je suis d'accord qu'on est en général plus frileux. Mais les exceptions sont nombreuses, et moins tapageuses (ou médiatisées) que le travil de Kaminski.
Pour prendre un exemple tout récent, les images de Patrick Blossier pour la série Les Revenants (actuellement sur C+) sont particulièrement soignées, en terme de composition et de lumière. Le travail est si juste, si délicat qu'il m'inspire tout autant de respect que celui d'un Kaminski.
Tout a fait!
RépondreSupprimerJ'en suis qu'au deuxième épisode, mais je dois avouer que l'image est étonnamment bien travaillée.
Ils sont pris leur temps et cela se voit.
Mais pour pour un Revenant, il y a beaucoup de "Merlin" et autre "retour de Vidocq".
Moi ca me tue, si on s'amusait juste a comparer l'image du Merlin français et du Merlin british, se serait édifiant.
Rien que les séquences de forêt, on passe du "bois de Vincennes" a une "forêt d'époque" bien plus magique et crédible, alors que je ne pense pas qu'il y ait une si grosse différence de budget.
(Et je ne parle même pas des scènes de conte de "Once upon the time" !)
je ne m'y connais pas trop mais je trouve que l'image ici, est très différente de ce que je vois d'habitude
RépondreSupprimerBonjour messieurs.
RépondreSupprimerNous sommes des professionnels maîtrisant la technique et tous capables de fabriquer proprement une image X ou Y.
Si mon travail s'arretait a cela, je m'ennuirais terriblement comme les images réalistes, même si les plus réussies nécessitent un important travail.
J'essaie d'avoir la confiance des réalisateurs et producteurs pour avoir la liberte de fabriquer des images que j'aime avec audace, élégance, gout et sans limites et même si parfois elles ne sont pas en totale cohérence et si j'aime l'idée de me fourvoyer Pascal ^_^.
Bien a vous.
Avez vous jetés un oeil sur la série "Cherif" ???.